Visites du Jour de l’An
» On doit une visite de Jour de l’An non seulement à ses amis, mais à ses connaissances éloignées, à ses supérieurs, aux personnes avec lesquelles on n’a que des rapports de service et d’affaires. S’abstenir de cette visite indiquerait un manque de savoir-vivre ou l’intention de suspendre toutes relations ultérieures.
Pour les visites officielles qui se font « en corps » il n’y a point d’indications spéciales à donner : un protocole particulier à chaque administration en règle les détails et l’usage les perpétue. Le jour et l’heure de la réception sont quelquefois fixés par le supérieur qui veut éviter l’encombrement de son antichambre ; mais c’est là une exception ; en général, on reçoit ses subordonnés le matin même du 1er janvier, celui d’entre eux qui est le plus ancien ou le plus élevé en grade prononce quelques phrases exprimant les vœux de bonheur, au nom de tous.
Pour les visites officielles, qui se font séparément, il n’y a pas de formule spéciale à employer ; la démarche suffit pour que le devoir de politesse soit rempli. Ainsi un jeune instituteur, allant chez le maire de sa commune au 1er janvier, aura satisfait à toutes ses obligations sans qu’il soit nécessaire de présenter le moindre vœu de bonne année. Mais s’il a été reçu dans la famille du maire, ou s’il a été l’objet de quelques marques particulières d’intérêt et de bienveillance, il devra formuler des souhaits de bonheur.
En dehors des visites officielles faites aux supérieurs, aux bienfaiteurs, on ne fait que des visites de parenté ou d’intime amitié le jour du 1er janvier ; pour les autres, on a toute la semaine, et même tout le mois.
Entre les membres d’une administration, il est des usages établis ; le plus répandu et le plus rationnel est le suivant : tous les messieurs se rendent chez les femmes de leurs collègues, le 1er, le 2 ou le 3 janvier, en commençant, bien entendu, par celles de leurs supérieurs ; ils ont parfois une quarantaine de visites à faire dans ces trois jours ; mais elles sont courtes et les libèrent pour le reste de l’année.
Dans le courant du mois, les femmes de ces fonctionnaires se rendent visite entre elles à leurs jours ; dans ces visites, pas plus que dans celles de leurs maris, il n’y aura d’échange de vœux de bonne année.
Dans les relations mondaines ordinaires, y a-t-il lieu de faire une visite spéciale de nouvel an ? La question se pose fréquemment ; d’aucuns nient cette nécessité et blâment fort l’habitude surannée de ces tournées de visites faites à époques réglées, qui n’entretiennent ni des rapports affectueux ni le plaisir d’un commerce agréable. il est certain que la vanité puérile d’avoir beaucoup de monde à ses réceptions à poussé parfois bien des femmes à multiplier les visites de jour de l’an pour attirer, en retour, toutes les personnes qui avaient oublié le chemin de leur demeure.
Pourtant la coutume, en elle-même, rend de réels services ; tous ceux qu’on a négligés dans le courant de l’année, ceux-là mêmes qu’on avait oubliés ne peuvent être froissés d’un long silence, si l’on s’empresse, au jour de l’an, de venir leur présenter ses hommages ou leur renouveler d’affectueuses protestations.
Toutes les personnes occupées excusent volontiers les retards, les abstentions, elles ne se formalisent pas aisément. Il leur suffit d’une aimable visite en Janvier, pour qu’elles se considèrent comme faisant partie de vos connaissances, vous rencontrent avec plaisir. Mais lorsqu’une vie de travail ne peut vous excuser, l’unique visite du nouvel an est insuffisante, il faut au moins apparaître trois ou quatre fois dans l’année chez la personne avec qui vous voulez demeurer en relations.
Les visites du jour de l’an durent 10 à 15 minutes. »
Liselotte, « le Guide des convenances. Nouvelle encyclopédie populaire des usages mondains », P. Orsoni éditeur, 1915.